Libre et solidaire : Une liberté solidaire et une solidarité libératrice
Libre et solidaire
Une liberté solidaire et une solidarité libératrice
Il est des moments où l’âme se sent submergée par une tristesse inexplicable et inexprimable. Un chagrin qui monte en nous, en moi, sans crier garde. Il est juste là, habitant au plus profond de mon cœur, le taraudant pour je ne sais quelle raison.
À cette tristesse, par un processus tout aussi mystérieux, s’associe une lucidité effrayante. On contemple les êtres, on se perçoit nous-mêmes tout autant que les autres sous un visage avilissant ne laissant aucun doute quant au rabaissement que suscite en nous ce désir d’élévation au détriment des autres. On observe ainsi, un peu avec dédain, beaucoup avec pitié, cette personne qui, pour complaire, n’en finit pas de gloser sur les membres de sa propre communauté. Alimentée par des constats parfois justes sur les insuffisances et les manquements de ses coreligionnaires, elle cherche à se faire, à s’élever, à plaire pour se faire et s’élever, en se distinguant par le contraste de ce qu’elle croit et présume être ses forces, ses qualités, ses mérites, avec ce qu’elle trouve et juge de plus mauvais chez les siens.
Et ainsi, malgré les enseignements de la religion et en dépit des leçons de l’histoire, pour la millionième fois, nous oublions que notre chance réside dans le groupe qui, pour exister, a besoin d’individus à la fois libres et solidaires. En effet, libres et solidaire. Parce que c’est d’abord dans cette liberté que réside la source de l’énergie créatrice sans laquelle l’individu, seul ou en groupe, redevient une redondance stérile, voire une charge encombrante. Une liberté qui est au demeurant constitutive d’une réelle et authentique solidarité. Rien n’est moins productif, en effet, et moins soucieux de l’intérêt d’autrui, que l’esclave, quand bien même il se résignerait à se soumettre sous le poids d’une quelconque contrainte. Mais également solidaire car, sans solidarité, la liberté se mue souvent en égoïsme sinon en animalité. De plus, sans une réelle solidarité, la liberté de chacun, et donc de tous, se trouverait immanquablement en danger face à l’idéologie de la peur et aux systèmes politico-économiques déshumanisants qu’elle protège et renforce.
Une liberté solidaire et une solidarité libératrice. Ce sont là sans conteste les fondements d’un rapport sain, car équilibré, entre l’individu et son groupe (associatif, communautaire ou social). La question éternelle reste pourtant sans réponse : où et comment vivre ce qui semble si aisé à dire ?
Par Abdelaziz Djaout